JAPON : "LA MISERE DU MONDE N'EST PAS DE DIMENSSION HUMAINE"

Cette citation de Coluche souligne bien l'impuissance même de l'homme face à une horreur qui le dépasse (souvent).
Je parle bien évidement des récents évènements se déroulant actuellement au Japon : Tremblements de terre, Tsunami, risque d'un Tchernobyl nippon risquant de transformer Tokyo en une ville post apocalyptique déjà évoquée dans des milliers de mangas auparavant. Seulement voilà, cela risque vraiment d'arriver ce coup-ci. Et là "curieusement", cela n'a rien d'excitant, car on sait que ce ne sera pas comme dans un manga : on ne pourra refermer le livre, on ne pourra pas arrêter la lecture du DVD, on ne pourra sortir de la salle de cinéma sous un ciel radieux en cette veille de printemps, en se disant qu'on s'est farci notre dose d'effets spéciaux morbides et qui brillent.
Car oui, au cinéma, la misère, la destruction massive, les explosions qui brillent, tout cela à un aspect esthétique teinté de romantisme noir. Notre fascination morbide pour le chaos cinématographique est toujours contrebalancé par notre bonne conscience qui nous dit : "eh, c'est du chiqué ! Alors va-y, prends ton pied !". Je parle de romantisme noir comme pour un touriste qui visite des ruines, un plongeur qui explore une épave, un téléspectateur regardant un reportage sur les bidonvilles de Calcutta et dont le réalisateur a soigneusement choisi de le filmer à telle heure, car à ce moment là, la lumière du soleil crée une atmosphère transformant la scène en une poésie noire et onirique. Tout cela nous fait oublier que dans ces ruines, ces épaves, ces camps, vivent où vivaient des êtres humains qui ont rit, pleuré, espéré, et se sont éteints parfois.
Alors oui, après tout : "eh oh, c'est pas not' faute aussi, hein !", oui, les images du tsunami passant en boucle à la TV montrant des vagues dignes du 2012 de Roland Emerich nous fascinent. On se retient de pousser un timide "Wow !" On essaye de rassembler notre humanité et à la longue, on essaye de prendre conscience qu'il se passe quelque chose de vraiment grave.

LE SYNDRÔME DU TITANIC AU JAPON

L'information aujourd'hui va tellement vite. Avant une catastrophe occupait les médias pendant des mois, voir des années. Aujourd'hui nous zappons. Qui parle encore aujourd'hui d'Haïti ? Qui parle encore aujourd'hui du tsunami en Thaïlande ? On zappe et on se dit que dans 6 mois, toutes les rédactions du monde occidental seront passés à autre chose.
Mais ce n'est pas le cas des Thaïlandais, des Haïtiens, et cela ne sera bientôt plus le cas sans doutes pour les japonais. En fait, voir des catastrophes arriver dans le tiers monde, c'est presque d'une morbide banalité pour les occidentaux, mais lorsque cela frappe l'un des pays les plus riches du monde, porteur d'une pop culture littéraire, vidéo-ludique et cinématographique qui influence l'art mondial (et le miens !), tout de suite ce n'est pas la même histoire !
Si le naufrage du Titanic est resté dans les mémoires, c'est parce qu'il était magnifique, porteur d'une noblesse sur le déclin, symbolisant toutes les couches d'une société s'affrontant dans une lutte des classes. Pourtant il existe des catastrophes bien plus incroyables que celle du Titanic : En 1945, le paquebot Wilhelm Gustloff est torpillé et coule avec plus de 9000 passagers ! Presque 10 fois plus de victimes que le Titanic ! Mis à part quelques historiens, qui s'en souvient aujourd'hui ? Et il n'est que le premier d'une longue liste de naufrages "pas assez glamour"que là encore, notre mémoire zappante a oublié...

LA PUISSANCE DES MOTS, L'IMPUISSANCE DU GESTE

Tout cela pour en venir à quoi ? Que pouvons-nous faire ? Déjà compatir, se rendre compte que cela se déroule pour de vrai, que si les médias se refusent "par pudeur" à nous montrer des images de victimes, se rendre compte qu'elles sont là. Accepter aussi que malgré notre impuissance de par la distance, nous devons essayer de garder ces évènements dans notre mémoire. Pour quoi faire ? On peut lutter contre une personne physique, un système, une institution, mais contre un phénomène naturel et forcément injuste... Que peut-on faire ?
Dans ce cas, pourquoi ne pas en vouloir aux ingénieurs de la centrale nuclaire qui est en train de bouillir actuellement ? Nous faut-il obligatoirement un responsable sur qui déverser notre colère ? Pouvait-on éviter cette "erreur humaine" au final ? Combien de chance sur des millions de possibilités un tusnami avait de frapper cette centrale ? C'est comme si demain un météorite s'écrasait sur Paris, et qu'on incrimine le chef des Pompiers de la capitale de ne pas avoir prévu une telle INFIME possibilité ? Quelle leçon en retirer ?
Franchement, je ne le sais pas. On peut palabrer sur le risque nucléaire, les constructions anti sismiques, etc... On se rends compte que le risque zéro n'existera sans doutes jamais, que pour avancer technologiquement et géographiquement, il faut prendre des risques qui peuvent être fatals parfois, que la Terre nous assène des leçons que notre sens moral ne peut comprendre ("pourquoi moi ? Pourquoi eux ? Qu'on t-ils fait de "mal "pour mériter cela ?").
Je pense donc que peut-être notre premier "devoir" sera de nous souvenir de ce qui se passe. Là encore pour quoi faire ? Pour quelles fins ? Là encore, je ne le sais pas clairement. Mais je sais qu'oublier l'histoire ne fera sans doutes que la répéter plus tard.
C'est peu... Mais au moins, à 10 000 kilomètres de ce drame "abstrait" pour nous autres européens qui avons pourtant connu cela il à de cela quelques dizaines d'années auparavant, nous n'avons pas le droit d'ignorer, ni même de minimiser, le drame d'un pays qui à maintes fois imaginé son effondrement par le biais d'œuvres de fiction, et qui le vit actuellement pour de vrai !

Ce post est-il réellement utile ?
Est-ce que finalement, je parle pour ne rien dire,
où pour sortir des banalités d'occidental "en sécurité"
qui veut juste purger sa conscience, où se la péter sur son blog ?
Est-ce que cela me touche plus profondément parce que
la culture nippone à une place importante dans mon coeur,
et que je veux exprimer mon désarroi maladroitement
mais sincèrement ? Je pense au final, que je veux juste avouer
mon impuissance, juste : "Me rendre compte que..."