vendredi 16 avril 2021

HELLBLADE – SENUA’S SACRIFICE : L’ENFER EST PAVÉ DE BONNES INTENTIONS…

 

 
Dans la catégorie fausse bonne idée d’associations d’idées hétéroclites, Hellblade en a eu une belle. Séduisante sur le papier, associer Psychose et dark fantasy se révèle assez bancale dans la réalité d’un jeu vidéo.
Nous suivons ainsi l’aventure épique de Senua, une guerrière Picte allant dans les enfers pour récupérer l’âme de son amour défunt ! Sa force, mais aussi sa faiblesse, seront des voix hantant son esprit, et qui ne seront que la manifestation d’une puissante psychose.
Mouais… Sauf que pas franchement. Et ce pour deux raisons.
La première est le contexte dark fantasy du récit. Associer ce type d’univers avec une pathologie ayant une connotation moderne dans la culture populaire, ça ne correspond pas. Si l’héroïne entend des voix, on ne se dit pas qu’elle est mentalement atteinte, mais qu’elle entend peut-être les voix d’esprits supérieurs. L’aspect scientifique médical ne colle donc pas du tout à l’univers médiéval fantastique ici proposé. Je ne dis pas que ça n’existait pas les esprits malades dans le passé, je dis juste encore une fois que dans l’imaginaire populaire, ça ne colle pas.
La seconde raison est que ces fameuses voix sont donc logiquement issues d’un imaginaire malade. Et donc, elles ne peuvent pas réellement agir avec notre réalité. Tout au plus, elles peuvent révéler des choses que le malade a perçut de manière inconsciente. Hors les voix de Hellblade guident parfois notre héroïne, jusqu’à la prévenir lors des phases de combats si un ennemi attaque par derrière! Alors OK, on peut parler de l’instinct de la guerrière, du bruit des pas de l’ennemi dans son dos, etc. Mais quand même, c’est fort de café!
Et c’est là que vient la conclusion possible de ce jeu (sans spoiler) : Tout cela ne serait-il pas la manifestation d’un esprit malade? Et on tombe dans le gros cliché pourri du récit qui se conclut par un magistral : « Et si tout cela n’était qu’un rêve ?»
Non mais sérieux ? Des mois d’étude de vrais cas de psychoses, d’entretiens avec des médecins, des malades, etc. pour en arriver à un truc aussi bateau pouvant sortir de l’esprit d’un élève de première année d ‘école de scénario en panne d’inspiration, et cherchant un twist final qui fera lever les yeux au ciel de son prof désabusé?
MOUAAIS….
Mis à part ce gros point noir qui m’a parfois fait sortir du jeu… j’ai adoré Hellblade. Déjà par sa direction artistique ultra cohérente et sans fausse note. Pour son héroïne charismatique à la fois très fragile et forte, non sexualisée (c’est pas le sujet). Son gameplay accessible avec quelques énigmes assez retorses. Ses combats parfois techniques alternant garde et attaque (jouez d’ailleurs en Facile. En normal les combats sont juste beaucoup plus longs, deviennent répétitifs et n’apportent rien de plus en terme de bonus de jeu). Bref un vrai régal pour les yeux et pour les sens. Car mis à part le point cité plus haut, Hellblade fini par prendre aux tripes tant on est en empathie avec son héroïne.
Pour illustrer visuellement ce récit, on dit que le jeu est esthétiquement très glauque. Alors oui… et non !
Si comme moi vous êtes un vieux geek qui bouffe du thriller et du fantastique depuis 40 ans, les trois premiers quart du jeu sont une « jolie balade » dans un univers sombre et gothique, mais de là à créer un malaise. En fait le malaise ne vient pas forcément du visuel efficace (à défaut d’être d’une originalité folle), mais des tourments sans fins de notre héroïne. Encore une fois, on est avec elle, on comprends sa souffrance, et ceci grâce surtout aux textes du jeu (dialogues, voix off, etc.) et le jeu incroyable de l’actrice ayant prêté son jeu si émouvant à son avatar virtuel (regardez le reportage inclus dans l’achat du jeu, et découvrez comment ils ont découvert l’actrice incarnant Senua). D’ailleurs, on regrettera que toutes les voix ne sont pas sous titrées. Ayez un bon niveau d’anglais pour alors déceler parmi les dialogues non traduits quelques informations essentielles qui vous faciliteront le gameplay !
Au final, Hellblade est avant tout un jeu sensoriel. Oubliez son concept de pseudo psychose hors sujet, dîtes vous que Senua devient juste de plus en plus folle au fur et à mesure de son aventure, et qu’elle vous entraîne avec elle non pas dans sa folie, mais dans sa souffrance, ses vœux pieux, ses espoirs, son apprentissage pour une conclusion logique, mais aussi épique que grandiose et haletante… jusqu'au second volet de ses aventures dans le trailer hallucinant de photoréalisme vous fascinera à coup sur !

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